02 mars 2022
Clémence Barbet

Zero Waste France participe au recours interassociatif contre le décret d’application de la “loi séparatisme”.

Le 2 mars 2022, Zero Waste France s’est jointe à un recours juridique porté par plusieurs associations, pour attaquer un décret de la « loi séparatisme ». Détails d’un texte anti-démocratique et dangereux pour les futures actions militantes.

Newsletter
Partager
Bluesky

La “ loi séparatisme” a pour objet de conforter les principes de la République, notamment par la mise à jour de la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat. Elle comporte ainsi plusieurs mesures affectant directement les associations, ce qui lui a valu de nombreuses critiques dès sa promulgation, le 24 août 2021.

La “loi séparatisme” a notamment créé le “contrat d’engagement républicain”. Il s’agit d’un texte sur le “respect des principes de la République” que les associations agréées doivent signer. Un décret du 31 décembre 2021 en détaille le contenu et l’application.

Le contrat d’engagement républicain est fortement décrié, car il constitue une régression de la démocratie et une atteinte aux libertés d’association et d’expression.

Zero Waste France s’est jointe à plusieurs associations telles que Greenpeace, France Nature Environnement, Les Amis de la Terre, Notre Affaire à Tous, Ligue pour la Protection des Oiseaux, Humanité et Biodiversité, Sherpa et Transparency Internationale France pour attaquer ce décret en justice.

Un contrat anti-démocratique et attentatoire à la liberté d’association et d’expression

Le contrat d’engagement républicain détaille sept engagements que les associations bénéficiant d’aides publiques ou d’agréments étatiques doivent respecter. Une fois signé par une association, le contrat doit être appliqué par tous ses membres (équipes, mais aussi bénévoles).

Les sept engagements du contrat sont relativement flous et imprécis, ce qui rend son application et son contrôle sujets à interprétation.

Le contrat prévoit notamment que les associations « ne doivent entreprendre ni inciter à aucune action manifestement contraire à la loi ». Cet engagement dissuade notamment les actions de désobéissance civile, qui sont un moyen historique et puissant d’expression et de manifestation dans les milieux associatifs. Par exemple, le mouvement Extinction Rebellion (XR) qui repose sur la désobéissance civile non violente, a permis de faire reconnaître l’urgence climatique au Royaume-Uni.

Plus globalement, cette disposition décourage l’organisation, la participation et le soutien à des manifestations – même pacifiques et non violentes – par les associations, dès lors que celles-ci pourraient troubler l’ordre public.

Cet engagement peut également empêcher les associations de tenir des propos contraires à la loi mais destinés à faire évoluer ou adopter une nouvelle réglementation. Inquiétant pour des associations comme Zero Waste France, qui est amenée à se prononcer sur des textes de loi à travers son plaidoyer. Un tel engagement peut réduire au silence ses activités juridiques et de plaidoyer.

En signant ce contrat, Zero Waste France comme d’autres ONGs pourraient être empêchées de mener certaines actions pour la protection de l’environnement car estimées contraires au contrat d’engagement. Ce constat est alarmant, car la libre expression et l’action des associations sont des libertés fondamentales dans une société démocratique.

Un contrat dangereux pour les associations agréées

L’irrespect des dispositions – relativement floues – du contrat d’engagement républicain est lourd de conséquences. En effet, si une association décide de mener une action qui ne respecte pas l’un des engagements du contrat, elle risque d’être sanctionnée par l’administration… et de perdre son agrément.

Zero Waste France bénéficie présentement d’un agrément pour la protection de l’environnement (article L. 141-1 du Code de l’environnement). Si elle menait des actions estimées (plus ou moins arbitrairement) contraires aux engagements du contrat d’engagement républicain, elle courrait le risque – non négligeable – de le perdre. Or, cet agrément lui permet d’être éligible aux subventions publiques et d’agir en justice

La menace de la perte de l’agrément conduit donc à réduire les moyens d’actions des associations.

Dans un contexte d’urgence climatique et sociale, et après une loi climat vidée de sa substance, les ONGs de protection de l’environnement, qui œuvrent dans l’intérêt général, risquent de voir leur liberté de parole et leurs moyens d’action limités. L’enjeu est d’autant plus grand, qu’à l’approche des élections présidentielles, la reconnaissance des droits fondamentaux et du rôle des associations doit permettre un engagement éclairé des citoyens sur des sujets d’intérêt général.

L’ensemble de ces raisons conduisent Zero Waste France, aux côtés d’autres associations, à demander l’annulation du décret du 31 décembre 2021 devant le Conseil d’Etat. Elle affirme son opposition à des lois et textes qui pourraient l’empêcher de s’exprimer et de mener à bien ses différentes actions en faveur de la protection de l’environnement.

Le communiqué de presse

Actualités

à la une
07 juin 2025

Lutte contre la pollution plastique : bientôt une loi pour généraliser le réemploi des emballages ?

Annoncée ce matin en amont de la Conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNOC), une proposition de loi transpartisane visant à “généraliser le réemploi des emballages sur le territoire français”[...]

28 mai 2025

Loi fast-fashion : Bercy cède aux lobbies

Le gouvernement vient de déposer un amendement sur la proposition de loi de réduction des impacts environnementaux de la “fast-fashion” qui doit être discutée au Sénat le 2 juin. Cet amendement su[...]

22 mai 2025

Déchets : Zero Waste France demande un moratoire sur tous les nouveaux projets d’incinération

Un nouveau rapport de Zero Waste France dévoile une tendance inquiétante au développement de méga-incinérateurs en France, sous prétexte de production d’énergie. Décorrélés des ambitions de préven[...]

29 avril 2025

Recyclage chimique des plastiques : Zero Waste France et deux associations locales attaquent le projet Eastman en justice

Zero Waste France, Le Havre Zéro Déchet et Zero Waste Rouen ont déposé, samedi 26 avril, un recours auprès du Tribunal administratif de Rouen pour demander l’annulation de l’arrêté préfectoral [1][...]

03 avril 2025

SIMPLIFICATION DE LA VIE ÉCONOMIQUE : LES RIVERAIN·ES BIENTÔT ÉVINCÉ·ES DU DÉBAT PUBLIC ?

Incinérateurs d’Ivry, de Créteil ou de Toulouse-Mirail, projet de recyclage chimique des plastiques en Seine-Maritime : autant de projets qui ont été supervisés ou garantis par la CNDP. L’existenc[...]

20 mars 2025

Le rôle des collectivités locales dans la lutte contre le plastique à usage unique

Face aux impacts croissants du plastique, les collectivités locales disposent de leviers essentiels pour réduire les plastiques à usage unique, tels que la commande publique, le soutien aux systèm[...]

20 mars 2025

La loi anti fast-fashion détricotée

Lors de son passage en commission développement durable au Sénat, la proposition de loi visant à encadrer les pratiques de la fast-fashion a été percutée par le pouvoir des lobbys. La Coalition St[...]

à la une
14 mars 2025

Mobilisation de la Coalition Stop Fast Fashion : 10 tonnes de déchets textiles déposés devant le Sénat pour l’adoption de la loi anti fast-fashion

La coalition Stop Fast-Fashion déplore que la proposition de loi votée en mars 2024 pour mettre fin à ce système de surproduction délétère ne soit toujours pas inscrite à l’ordre du jour du Sénat.[...]

13 mars 2025

Décret autorisant la vaisselle plastique dans les établissements accueillant des enfants : non au plastique dans les cantines

Nous la croyions définitivement bannie des repas de nos enfants depuis le 1er janvier, grâce aux avancées permises par les lois EGalim et Agec. Mais c’était sans compter la pression des industrie[...]

21 février 2025

DEVOIR DE VIGILANCE EN MATIÈRE DE PLASTIQUE : LES ONG ET DANONE PARVIENNENT À UN ACCORD DANS LE CADRE D’UNE MÉDIATION

En janvier 2023, la coalition d’ONG ClientEarth, Surfrider Foundation Europe, et Zero Waste France assignait la société Danone pour non-respect à leurs yeux du devoir de vigilance en matière de pl[...]