Loi de transition énergétique: un an après, quel bilan pour l’économie circulaire?

Paris, le 21 juillet 2016 - Un an après le vote de la loi de transition énergétique, Zero Waste France vous propose un bilan de son impact dans le domaine de la gestion des déchets.

Crédits image: Zero Waste France
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La Loi de transition énergétique adoptée en août 2015 définit pour la première fois dans le Code de l’environnement le concept d’économie circulaire, et rend même contraignanteune nouvelle hiérarchie dans l’utilisation des ressources.
Un an après, le bilan que dresse Zero Waste France de l’application des dispositions du titre IV consacré à l’économie circulaire est cependant mitigé : tout reste à faire, ou presque, pour donner corps aux mesures ambitieuses de la LTECV.
A lire également : Le bilan complet de la LTECV sur le site du Réseau Action Climat-France (RAC-F).

Tri des biodéchets

D’ici à 2025, tous les habitants du territoire français doivent disposer d’une “solution de tri à la source” de leurs biodéchets, seule option permettant une valorisation matière de qualité. C’est là une des avancées les plus notables de la LTECV. L’enjeu principal de son application, qui un an après anime les discussions actuelles entre ministères de l’écologie et de l’agriculture d’une part et collectivités d’autre part, est de définir quelles sont les solutions de tri acceptables. L’atteinte de l’objectif de la LTE ne pourra en effet pas se faire en se contentant de la mise à disposition de quelques composteurs individuels, ou de l’ouverture de quelques points de compostage partagés dans les centres urbains, au regard du gisement particulièrement important à traiter. Les exemples français (par exemple, les adhérents du réseau Compost Plus) et internationaux (Milan, San Francisco, Parme, New-York, Londres, Barcelone… ) de villes qui appliquent déjà cette obligation doivent être mobilisés pour que l’objectif apparaisse plus clair, précis et donc actionnable du point de vue des territoires.

TMB, CSR, Incinération

Les usines de tri mécano biologique (TMB), clairement décrites comme “non pertinentes” par la Loi de transition énergétique du fait de la progression du tri à la source des biodéchets d’ici à 2025, constituent pour de nombreuses collectivités un obstacle important à une réorganisation du service public. Plus problématiques encore, plusieurs projets de nouvelles usines sont encore portés à l’heure actuelle par des collectivités, et d’autres entendent clairement pérenniser leurs investissements dans leurs installations déjà en fonctionnement, bridant ainsi, dans les deux cas, l’essor de la collecte séparée des biodéchets. Du fait de l’existence de nombreux TMB, la production en masse de combustibles solides de récupération (CSR – potentiel évalué à 2,5 millions de tonnes) à court terme est un virage délétère, pourtant soutenu par l’Etat, un an après le vote de la LTECV.

Par ailleurs, l’objectif de réduction de la mise en décharge des déchets (-50 % en 2025 par rapport à 2010) de la LTECV ne doit pas être entendue comme un simple report massif vers l’incinération ou la pyro-gazéification. C’est bien, conformément à la hiérarchie reprise dans la LTECV, la réduction de la part de l’élimination des déchets (stockage, incinération et autres traitements thermiques) qui doit rester primordiale. Pourtant, plusieurs grandes agglomérations françaises entendent construire ou reconstruire à court terme des incinérateurs, comme en Ile-de-France avec le projet Ivry-Paris 13 dont le montant total atteint les 2 milliards d’euros (en savoir plus). L’Etat, qui autorise in fine ces installations, doit donc rester extrêmement ferme et promouvoir une démarche de réduction rapide des déchets résiduels, constitués en grande partie de déchets recyclables en l’état des consignes de tri, au risque de ne pas pouvoir atteindre les autres objectifs de la LTECV.

Halte au jetable!

L’entrée en vigueur (avec seulement 6 mois de retard) de l’interdiction des sacs plastiques de caisse à usage unique le 1er juillet 2016 marque une première étape encourageante dans l’objectif de diminuer le recours aux produits jetables. La prochaine étape concernera, au 1er janvier 2017, les sacs plastiques destinés à l’emballage des fruits, légumes et autres produits achetés en rayon (poissonnerie, boucherie,…), qui devront disparaître ou bien être remplacés par des équivalents compostables en compost domestique. La vigilance reste de mise quant au contrôle de la mesure, au respect des normes de compostabilité et à la répression effective des contrefaçons, et au respect de la priorité qu’est la réduction du jetable : dans la majorité des cas (fruits et légumes notamment) l’achat en vrac dans le cabas ou l’utilisation de sacs fins réutilisables sont les alternatives à privilégier.

Le rôle des régions dans l’application du volet économie circulaire de la LTECV

La compétence de planification des déchets appartient depuis la loi NOTRe aux Régions, qui disposent d’un cadre réglementaire clair fixant le contenu des plans. Elles vont donc avoir un rôle fondamental de planification des installations de tous types à créer sur leur territoire. De plus, elles auront à cette occasion l’opportunité de créer localement des synergies entre les acteurs concernés (notamment à l’aide du plan d’action en faveur de l’économie circulaire) et de construire des ponts avec d’autres compétences régionales, comme le développement économique, qui peut bénéficier du développement de l’économie circulaire.
Autrement dit, si l’application du volet Economie circulaire de la LTECV est en grande partie dans les mains des intercommunalités (qui ont la compétence de collecte et de traitement des déchets), ce sont bien les régions qui devront donner l’impulsion et harmoniser les stratégies locales, dans les prochains mois (les plans devant être adoptés d’ici février 2017 d’après la loi NOTRe).
Pour rendre possibles ces stratégies territoriales, le financement de l’économie circulaire doit être assuré. En ce sens, c’est notamment une réforme de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) qui doit être menée au plus vite, élargissement aux produits jetables et hausse des taux tant sur la mise en décharge que sur l’incinération, qui font perdre à l’économie française près de 34 millions de tonnes de matériaux chaque année.

Contactthibault@zerowastefrance.org

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