Programmation pluriannuelle de l’énergie et déchets : investissons dans les vraies solutions

La valorisation énergétique des déchets ne doit pas freiner le développement de l'économie circulaire, rappelle Zero Waste France dans sa contribution écrite.

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La nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) est en cours d’élaboration, sous l’égide de la Commission nationale du débat public. Ce document est censé mettre en oeuvre la loi de transition énergétique de 2015 et programmer par filière l’approvisionnement énergétique français jusqu’en 2028. Parmi tous les sujets sur la table, la place de la valorisation énergétique des déchets dans le mix énergétique du pays. Zero Waste France vient de contribuer au débat, en appelant à ce que la valorisation énergétique des déchets (notamment par incinération, décharge, combustibles solides de récupération) ne freine pas le développement de l’économie circulaire.

Quel rapport entre énergie et déchets ?

La valorisation énergétique désigne toutes les technologies qui permettent, via le traitement des déchets, de récupérer de l’énergie (gaz, chaleur et électricité). Il s’agit tant de procédés écologiquement intéressants (méthanisation des déchets organiques, utilisation des huiles alimentaires usagées en chaudière, etc.) que de procédés industriels non soutenables sur le long terme (biogaz issu des décharges, incinération des déchets, combustibles solides de récupération, etc.).

La programmation pluriannuelle de l’énergie en cours d’élaboration est donc un processus important dès lors qu’elle doit fixer des objectifs de production énergétique par filière et donc aussi pour celle des déchets. Or certains procédés de valorisation énergétique des déchets concurrencent directement les politiques locales de réduction et de recyclage. C’est notamment le cas de l’incinération qui mobilise des investissements très lourds, à amortir sur le long terme, et qui freine d’autant les progrès du zéro déchet. La revente d’énergie constitue également une part substantielle des revenus tirés par les industriels (réseaux de chaleur, revente d’électricité), qui n’ont guère envie de voir cette manne disparaître. Autre exemple avec les décharges, où la production d’énergie par captation du « biogaz » rentre directement en concurrence avec l’objectif de ne plus y enfouir de biodéchets, et de mieux collecter les déchets recyclables qui se décomposent (papiers, bois etc.). En somme, énergie et gestion des déchets ne font pas toujours bon ménage.

L’élimination des déchets encore largement soutenue par la réglementation

Il faut bien le constater, les modes de traitement des déchets les plus polluants tels que la mise en décharge ou l’incinération sont encore largement soutenus par la réglementation et les investissements privés et publics.

On ne compte plus les soutiens dont bénéficie l’incinération : la moitié de l’énergie produite par ces usines est considérée comme « renouvelable », les réseaux de chaleur bénéficient d’un taux de TVA réduit, le calcul de leur performance énergétique biaise la réalité en n’incluant pas « l’énergie grise » des déchets, les usines les plus performantes ont des réductions substantielles de taxe sur les activités polluantes (taux minimal de 3€/ tonne), l’électricité produite peut être revendue à tarif préférentiel (1,66 milliards d’euros perçus par les exploitants entre 2002 et 2014)…

Ce n’est qu’un exemple : de nombreux soutiens sont aujourd’hui massivement alloués à des technologies artificiellement rentables, dont on sait qu’elles ne sont pas satisfaisantes à court et long terme, de part leurs coûts élevés, leur impact environnemental, etc. La prévention est quant à elle largement sous-dotée, attirant moins de 1% du budget des collectivités locales en moyenne.

L’occasion de tout remettre à plat ?

Zero Waste France a participé à une première réunion au Ministère de la transition écologique le 17 novembre 2017, et consulté les contributions écrites des industriels associés à l’élaboration de la PPE (FNADE, SVDU, Amorce notamment). Ceux-ci proposent des objectifs très élevés de valorisation énergétique notamment par incinération, ce qui serait tout à fait contraire aux orientations de la loi de transition énergétique qui privilégie la réduction et le recyclage des déchets.

Après des années de soutien gracieusement alloué aux industriels du secteur, il est donc temps de reconsidérer l’aide allouée à ces technologies et admettre que dans ces conditions, les alternatives ne pourront pas véritablement décoller. La programmation pluriannuelle de l’énergie doit ainsi être l’occasion de remettre à plat certaines réglementations trop favorables, et d’investir au bon endroit : prévention, réemploi, compostage et recyclage des déchets.

La démarche Zero Waste, dont on sait qu’elle est plus intensive en emplois et présente des bénéfices environnementaux certains, doit bénéficier au plus vite d’un basculement de ces aides financières et faveurs réglementaires.

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