INC-5.2 : dernière ligne droite pour le traité plastique – les ONG réclament des mesures fortes de réduction à la source

Alors qu’un accord aurait dû être finalisé lors de l’INC-5.1 fin 2024, une ultime session de négociations se tiendra du 5 au 14 août 2025 à Genève. À quelques jours de cette échéance cruciale, les ONG rappellent qu’un traité ambitieux ne peut exister sans une réduction claire et contraignante de la production de plastique.

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Bluesky

Mise à jour – 13 août 2025

Alors que les négociations sur le traité international visant à mettre fin à la pollution plastique doivent aboutir ce 14 août 2025 à Genève, l’absence de consensus bloque l’adoption d’un accord. Le président des négociations, Luis Vayas Valdivieso, a proposé un nouveau texte censé servir de base aux discussions finales, mais cette version constitue un recul historique par rapport aux ambitions initiales.

C’est pourquoi Surfrider Foundation Europe et Zero Waste France appellent à rejeter ce texte et à repartir d’une base plus ambitieuse, intégrant les propositions de plus d’une centaine de pays engagés. Sans cela, ces négociations risquent de se conclure par un échec collectif, face à l’urgence environnementale et aux attentes citoyennes.

Lire notre communiqué

Produire moins : une urgence sanitaire et environnementale

La pollution plastique est désormais omniprésente : dans l’air, les sols, les océans — mais aussi dans notre organisme. Des études ont confirmé la présence de microplastiques dans le sang, les poumons, le lait maternel et même le placenta. Face à cette contamination généralisée, il est impératif de s’attaquer à la source : la production excessive de plastique.

Le futur traité ne pourra être efficace qu’en fixant des objectifs chiffrés de réduction, avec des priorités claires : éliminer les plastiques non essentiels, à usage unique ou contenant des substances toxiques. Plus de 600 ONG à travers le monde, dont Zero Waste France, appellent les États à inscrire cet impératif dans le cœur du traité [1].

Bien que 96 pays aient soutenu l’Appel de Nice en faveur d’une réduction mondiale de la pollution plastique, certains continuent de freiner les progrès en s’appuyant sur le principe du consensus, qui exige l’unanimité, plutôt qu’un vote à la majorité. Pourtant, l’OCDE alerte : sans changement radical, la production mondiale de plastique pourrait tripler d’ici 2060 [2]. Il y a donc urgence à inscrire des engagements concrets, fondés sur les données scientifiques.

Lire notre communiqué de presse

Cibler les produits et substances les plus problématiques

Réduire la production passe nécessairement par l’interdiction ou la limitation des plastiques les plus polluants : objets à usage unique, microplastiques intentionnels, emballages jetables, additifs dangereux. Le projet de traité prévoit des annexes listant certains produits à restreindre, mais ces propositions restent trop faibles pour infléchir significativement la courbe de la pollution.

130 ONG de 5 continents demandent ainsi une réduction drastique des bouteilles en plastique [3], deuxième source de déchets plastiques au niveau mondial. Les emballages à usage unique de manière générale — qui représentent près de 40 % de la production de plastique — doivent également figurer parmi les cibles prioritaires.

Pour être cohérente, la sélection des produits à éliminer doit reposer sur des critères partagés : non-essentialité, dangerosité, et contribution significative à la pollution plastique ou microplastique, en particulier par fragmentation ou dispersion dans l’environnement.

Concevoir autrement pour sortir du tout-jetable

Pour sortir de la logique du tout-jetable, le traité doit intégrer des critères clairs dès la conception des produits plastiques : durabilité, réutilisation, absence de substances dangereuses. Pourtant, la version actuelle du texte reste trop centrée sur des approches techniques comme le recyclage, et ne propose pas de véritable vision d’ensemble fondée sur la sobriété et le réemploi.

Mettre en œuvre une économie circulaire efficace nécessite de s’attaquer aux racines du problème : le design même des produits, leur cycle de vie, leur utilité réelle. Cela signifie développer des systèmes de réemploi robustes, repenser les formats et limiter l’usage des plastiques aux seules fonctions réellement nécessaires.

Faire des REP un véritable levier de réduction du plastique

Les systèmes de responsabilité élargie du producteur (REP), fondés sur le principe pollueur-payeur, sont l’un des outils de financement prévus par le traité. Pour qu’ils deviennent un véritable levier, ils doivent avant tout viser la réduction à la source, en imposant des obligations claires aux producteurs dès la conception et la mise sur le marché des produits plastiques.

Cela implique des mécanismes incitatifs efficaces (bonus-malus, exclusion des produits dangereux ou non recyclables), un suivi transparent des résultats et une gouvernance publique, avec la participation de la société civile. Il est essentiel d’éviter que ces dispositifs ne soient captés par les intérêts privés, au risque de freiner leur efficacité et de nuire à leur légitimité.

Les REP ne doivent pas être les seuls outils financiers du traité. Il est indispensable d’envisager d’autres leviers, comme une taxe mondiale sur les polymères plastiques vierges, afin d’impliquer les producteurs en amont. Enfin, aucun financement, public ou privé, ne devrait soutenir des technologies polluantes ou non éprouvées, telles que l’incinération, la pyrolyse ou les crédits plastiques. Les vraies solutions passent par la sobriété, le réemploi et la réduction à la source.

Dernière chance pour un traité ambitieux

L’INC 5.2 représente la dernière opportunité de conclure un traité ambitieux et efficace. Les preuves scientifiques ne manquent plus : la pollution plastique porte atteinte à la santé, au climat, à la biodiversité et aux droits humains. Il est donc urgent de traduire ces alertes en décisions contraignantes.

Zero Waste France et ses partenaires appellent les États à faire preuve de courage politique : réduire la production de plastique, restreindre les usages les plus polluants, et mettre en place des mécanismes de financement justes et indépendants. Il en va de la crédibilité du traité, mais surtout de notre capacité collective à enrayer la pollution plastique.

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