02 février 2023
Moïra Tourneur

Extension des consignes de tri : le coup de baguette magique du recyclage ?

Prévue par la loi de transition énergétique de 2015, l’extension des consignes de tri est en passe d’être généralisée. Concrètement, qu’est-ce que ça signifie en matière de tri pour les particuliers, et en matière de traitement pour les déchets ? Zero Waste France fait le point.

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L’extension des consignes de tri, qu’est-ce que c’est ?

L’extension des consignes de tri est aussi appelée « simplification » du geste de tri. Alors que nous nous retrouvons souvent perplexes devant nos poubelles jaunes, à nous interroger sur quels emballages, notamment plastiques, peuvent ou non y être jetés, l’extension des consignes de tri entend lever ces interrogations. Les habitant·es en extension des consignes de tri peuvent mettre tous les emballages dans le bac de tri, sans se demander si c’est effectivement recyclable ou non. Les centres de tri effectuent ensuite un surtri pour orienter les emballages vers des filières de recyclage ou bien en traitement ultime (incinérateur ou décharge).

Sur le principe, cette « simplification » est censée permettre d’augmenter le recyclage : le tri, plus facile, devient a priori plus systématique. En théorie, tous les emballages potentiellement recyclables peuvent donc être captés, là où des erreurs de tri auparavant plus fréquentes pouvaient les éloigner du bac jaune. D’après Citeo, 98 % de la population française métropolitaine était concernée par l’extension des consignes de tri au 1er janvier 2023.

Trier tous les déchets pour recycler tous les déchets ?

Pour autant, rappelons que ce n’est pas parce qu’un emballage se retrouve dans le bac des recyclables qu’il sera automatiquement recyclé. La captation des déchets recyclables est une condition essentielle à leur bon recyclage ; leur recyclabilité en est une autre. À l’heure actuelle, seuls 65 % des emballages plastiques mis en marché en France sont techniquement recyclables et peuvent être envoyés dans des filières de traitement capables de les prendre en charge. 15 % « disposent de filières de recyclage en développement », c’est-à-dire que de l’argent est investi pour tenter de créer des techniques permettant de les recycler … sans certitude cependant. Pour finir, 20 % des emballages plastiques que l’on nous vend ne sont tout simplement pas recyclables : la seule fin de vie possible pour ces déchets est l’incinération ou la décharge. Triés ou pas, ces déchets-là ne seront jamais recyclés puisque ce n’est tout simplement pas possible.

Si l’extension des consignes de tri permet de faciliter le geste de tri pour les particuliers et donc de récupérer quasiment tous les emballages qui pourraient faire l’objet d’un recyclage, elle ne rend pas plus recyclables les déchets qui ne le sont pas. D’aucuns avancent que l’extension, en augmentant le gisement de tous les emballages captés, va permettre de créer une demande pour développer de nouvelles filières de recyclage. C’est oublier que les efforts industriels ne doivent pas tant se concentrer sur le traitement des déchets que sur la limitation de leur production : si telle matière plastique n’est actuellement pas recyclable, ne vaut-il pas mieux substituer à l’usage unique du verre réemployable ou bien un autre matériau au moins recyclable selon les techniques qui existent, plutôt que d’investir du temps et de l’argent pour développer d’hypothétiques filières de recyclage dont la viabilité technique, opérationnelle et économique n’est pas assurée ? Comme l’affirme la chercheuse à l’INRAE Nathalie Gontard, « le pari d’améliorer les techniques de recyclage est terriblement hasardeux, car la rentabilité environnementale de ces techniques reste à établir, alors que les enjeux environnementaux se jouent dès aujourd’hui ». Attention donc à ce que l’extension des consignes de tri ne viennent pas amoindrir la responsabilité des metteurs en marché en matière d’écoconception en ne mettant la focale que sur le geste de tri réalisé par les consommateurs et consommatrices.

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